L’Homme a toujours eu cette tendance à regarder ce qu’il n’avait pas déjà, ce qui lui manque, ce qu’il désire par dessus tout pour combler un vide. C’est d’autant plus vrai dans nos sociétés actuelles qui nous pousse à la consommation.
Entre un hier que nous estimons « pas assez à la hauteur » et un demain qu’il « faut atteindre », il n’existe plus vraiment de place dans notre quotidien pour penser au présent. Et très vite, la mécanique s’enraille avec des émotions et pensées négatives : stress, nostalgies, idées noires, solitudes, colères, tristesses, … Autant de pensées nocives qui nous pourrissent la vie et qui influent forcément sur le bien-être de notre corps.
Alors, pour se sortir de cet enfer moderne, la psychologie positive met en avant un certain nombre d’attitudes à adopter. Et l’une d’entre elles, c’est la gratitude. Cela peut sembler un peu léger pour les sceptiques que nous sommes, et pourtant, tout porte à croire qu’adopter ce comportement pousse les gens vers le bonheur.
La gratitude est une force puissante qui ne laisse aucune place au sentiment de colère et de frustration. Savoir remercier et être reconnaissant envers ce que nous possédons déjà, ce que nous sommes déjà et tous les petits ou grands détails que nous vivons au quotidien, c’est déjà faire l’expérience du véritable bonheur !
La gratitude permet de se réconcilier avec la vie
« La gratitude se réjouit de ce qui a lieu, ou de ce qui est. Elle est l’inverse du regret ou de la nostalgie, qui souffre d’un passé qui ne fut pas, qui n’est plus, comme aussi de l’espérance de l’angoisse, qui désirent ou craignent un avenir qui n’est pas encore, qui ne sera peut-être jamais, et qui les torturent pourtant de son absence », André Comte-Sponville.
Depuis que nous sommes petits, nous avons cette tendance à pousser vers l’avant nos idéaux. Et, porté par le désir de croire en un avenir toujours meilleur, nous oublions souvent de regarder autour de nous.
L’un des premiers pas vers ce fameux sentiment de gratitude, c’est de cesser de regarder par la lorgnette de notre égo. Car sans même que ce soit une démarche consciente, nous nous affublons de tout un tas de charges quotidiennes qu’il nous revient de porter. C’est ce qu’on appelle le complexe d’Atlas : cette volonté de tout gérer pour que notre réalité soit en phase avec nos désirs.
Or, et chacun le sait, cela ne se passe jamais comme nous l’avons prévu. Et c’est en général à ce moment-là que resurgissent de vieilles angoisse qui s’actualisent et prennent la forme d’un « je suis bon.nne à rien », « je suis nul.le », « je n’y arriverais jamais », etc. Suite à quoi nous renforçons nos systèmes de défense pour faire face à l’angoisse et redoublons d’efforts pour tout organiser à notre guise. C’est ce qu’on appelle un cercle vicieux et ça peut mener malheureusement très loin.
La gratitude offre la possibilité de rompre ce cercle pour un créer un autre, vertueux cette fois. Car en prenant conscience de ce qui nous entoure et en l’acceptant, cela permet d’un seul coup de « faire avec ». Et faire avec la vie, ce n’est pas l’anticipé ni la regretter, c’est accepter les événements qui se présentent à nous en reconnaissant nos limites.
Et d’un seul coup, ce poids si lourd que nous avions à porter s’envole pour laisser place à un sentiment de joie et de reconnaissance d’être simplement là, en famille ou entre amis.
« Se réjouir de ce que nous considérons comme des acquis : une famille, un toit, une bonne santé, nous fait apprécier notre vie », explique Phillip Watkins, chercheur en psychologie à l’université de psychologie de Washington.
La gratitude nous guérit de bien des maux
Depuis le début des années 2000, beaucoup de psychologues se sont rendu compte que jusqu’à présent, ils n’avaient pensé l’être humain qu’en termes de maladies mentales et de pathologies. Voilà pourquoi, la psychologie positive décide aujourd’hui d’inverser la tendance et de se tourner vers l’observation de ce qui rend les gens heureux.
Et ils se sont longuement attardés sur l’un de ses piliers, la gratitude. Une attitude qui pour eux « aide une personne à diriger son attention vers les choses heureuses de sa vie et à le détourner de ce qui lui manque. »
En effet, s’engager dans une démarche reconnaissante permet de se rendre compte que pour un bien reçu, qu’il soit matériel ou immatériel, il a eu la nécessité d’un effort de la part de la personne qui l’a produit. Il existe ici un mécanisme fondamental : reconnaître que ce qui est la source d’un plaisir se trouve à l’extérieur de moi.
Or, de tout temps, l’être humain a eu besoin de reconnaissance. C’est même l’une des conditions essentielles à son existence. À tel point, qu’il procure des bienfaits psychiques et physiques aujourd’hui quantifiables. En effet, il est admis que les personnes qui usent régulièrement de la gratitude sont moins stressées, ont moins de problèmes de sommeil et sont en meilleure santé.
Une étude menée par les scientifiques Robert Emmons et Michael McCullough le confirme. Ils ont fait appel à plusieurs centaines de personnes qu’ils ont divisées en trois groupes :
- le premier devait tenir un journal de ses expériences quotidiennes
- le deuxième devait tenir un journal de ses expériences désagréables
- le troisième devait tenir un journal des événements pour lesquels ils pouvaient être reconnaissant
Sur les trois groupes, le seul qui présente un état général positif est le dernier. Les chercheurs se rendent également compte que les personnes pratiquants régulièrement la gratitude ont plus souvent tendance à prendre soin d’elle, sont douées d’une plus grande détermination, sont moins sujettes à la dépression et ont des performances psychiques et physiques accrues.
La gratitude soigne notre relation aux autres
« L’homme qui est incapable de vivre en communauté ou qui n’en éprouve pas le besoin parce qu’il se suffit à lui-même, ne fait pas partie de la cité et par conséquent est une brute ou un dieu », Aristote.
Il y a dans la gratitude, une main tendue vers l’autre. C’est à la fois offrir son aide et être reconnaissant envers autrui. Évidemment, il ne s’agit pas d’un simple merci balancé entre le café et le dessert. Non, il est le signe d’un sentiment d’appartenance à un groupe, à une collectivité.
Remercier, et faire don, sont deux attitudes qui soulignent le lien à l’autre et qui renforcent notre sentiment d’existence. Exprimer sa gratitude, c’est en quelque sorte accepter un grand vent d’humanité dans lequel nous transmettons à l’autre un peu de nous pour lui signifier que nous appartenons au même ensemble.
Et plus cette attitude sera développée, plus elle incitera les personnes autour de vous à en faire de même. C’est ainsi que se forment ce fameux cercle vertueux, source d’épanouissement et de bien-être.
Selon Robert Emmons : « pratiquer la gratitude détourne l’attention du moi, la dirige davantage vers les autres et ce qu’ils nous procurent. »
Quelques exercices pour cultiver la gratitude
Cela paraît relativement simple sur le papier, mais en réalité, c’est loin de l’être. Déjà parce que nous évoluons dans une société où tout optimisme est forcément suspect. Et ensuite, parce que nous avons cette tendance innée à être relativement sceptiques.
Alors pour les plus sceptiques d’entre nous, les scientifiques recommandent au départ de faire « comme si », avant que cela ne devienne une habitude plus naturelle.
Avoir un regard neuf sur ce qui vous entoure
Avoir un regard neuf, c’est un peu comme s’amuser à devenir un touriste dans sa propre vie. Cela permet de regarder autour de soi et de se rendre compte de toutes ces petites choses qui nous facilitent le quotidien et que nous avons l’habitude de considérer comme acquises. Cela peut aller du simple sèche-linge, à l’eau du robinet en passant par la baguette de pain.
L’idée est de poser un regard sur la vie comme le ferait un enfant en bas-âge privé de toutes notions de responsabilité et de pessimisme quotidien où seule la curiosité, la découverte et la satisfaction d’apprendre quelque chose de nouveau pour progresser est présente.
Faire un bilan positif et constructif de votre journée
Le soir avant de vous coucher, surtout après une dure journée, vous devez penser à tous les événements agréables que vous avez vécus dans la journée en dépit de tous les tracas. Ce peut-être des petits riens, mais ils peuvent faire toute la différence : un rayon de soleil qui illumine le paysage, un bon bain chaud, un repas entre ami.e.s, …
Si la journée a été parfaite sur tous les plans alors ne vous reposez pas sur vos lauriers et faites le même exercice en le réalisant et en étant totalement reconnaissant.e de cette journée idéale !
Quand bien même si vraiment rien ne vous interpelle ou que vous ne voyez que du noir, forcez vous à analyser ce que vous avez vécu sur différents angles et cherchez y un sens constructif (plutôt que pessimiste) qui vous apportera une leçon de vie pour grandir, pour vous rendre plus fort que vous ne l’étiez la veille. Remerciez dès lors cette expérience de vie plus ou moins « négative » qui vous permettra d’avancer.
Chercher ce qui vous a conduit à des événements positifs
Ici, il s’agit d’aller chercher plus en profondeur ce qui aurait pu amener des éléments positifs dans votre vie sur une large période. Qui vous a permis de rencontrer votre partenaire ? Comment avez-vous postulé pour ce travail qu’aujourd’hui vous aimez tant ? Qu’est-ce que vos parents vous ont transmis à l’époque qui vous a permis récemment de réaliser une action gratifiante ?
Il s’agit de faire une introspection pour aller chercher tous les éléments de votre vie passé qui ont eu un impact positif sur celle-ci et de faire un focus sur ces aspects de vie, pour se remémorer d’où l’on vient et de se concentrer uniquement sur les aspects positifs malgré tout le reste afin d’entretenir cette puissante énergie optimiste.
D’une manière générale, la gratitude nous conduit à faire le constat suivant : les événements exceptionnels que nous attendons tant sont en réalité déjà là !